C o m m u n i c a t i o n
& M a n a g e m e n t
C o m m u n i c a t i o n
& M a n a g e m e n t
r e c h e r c h e s - p r a t i q u e s
Co-dirigé par :
Dominique MAUREL, Professeure agrégée, École de bibliothéconomie et des sciences de l’information, Université de Montréal
Natasha ZWARICH, Professeure, Département d’histoire, Université du Québec à Montréal
Lise VERLAET, Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication, Université Paul-Valéry Montpellier 3, LERASS-Céric (EA-827)
Les enjeux informationnels et communicationnels auxquels font face les organisations publiques et les entreprises privées sont nombreux, qu’il s’agisse de leurs obligations de conformité, de leur réputation envers leurs publics, clients, fournisseurs et bailleurs de fonds, ou encore de leur performance. Ces enjeux incluent notamment des risques liés à la sécurité, l’intégrité et la disponibilité des contenus informationnels (Lemieux, 2013). La co-existence souvent non contrôlée de pratiques et dispositifs individuels et collectifs, au sein d’une même organisation, contribue à entraver la gestion des contenus informationnels et, au final, le développement d’une culture informationnelle commune (Bergeron et al., 2009; Smallwood, 2016). De tels enjeux deviennent critiques dans un contexte où les contenus informationnels, au-delà des technologies qui les soutiennent, représentent des actifs organisationnels essentiels à la réalisation des processus d’affaires (Kooper et al., 2011; MacLennan, 2014).
Plusieurs acteurs organisationnels se partagent – ou peuvent être tentés de revendiquer – un aspect du territoire de l’information et de la communication au sein des organisations, par exemple les spécialistes de l’information, de la documentation, du records management, de la communication, des technologies, mais aussi des affaires juridiques, de la sécurité et de la gestion des risques, ou encore de la vérification interne ou du service qualité. Dans une telle réalité compartimentée, diverses approches se côtoient quant aux référentiels, pratiques et dispositifs disciplinaires à privilégier (informationnels, technologiques, juridiques, etc.) pour assurer la gestion, l’intégrité et la sécurité des actifs informationnels de l’organisation. Plusieurs fonctions d’information-documentation-communication sont ainsi assumées par des unités administratives distinctes agissant souvent sans concertation entre elles, au risque de dédoubler les efforts, de multiplier les directives, dispositifs et plateformes, ou de négliger la prise en compte d’un certain nombre d’enjeux informationnels (Schlögl, 2005; AIIM, 2014).
Une réponse à ces enjeux pourrait bien consister en l’adoption d’un cadre de gouvernance de l’information voué à préciser les principes et règles de base, la structure de direction et les modalités de gestion de l’information pour que l’information soit utilisée de manière efficace et efficiente dans l’organisation (Logan, 2010; EDRM, 2011; ARMA International, 2018). Un tel cadre de gouvernance devrait préciser les comportements attendus (et non seulement souhaités) relativement à la création, au stockage, à l’évaluation, à la disposition et à l’utilisation de l’information (McManus, 2004; MacLennan, 2014) ou, plus largement, des actifs informationnels d’une organisation. Ceux-ci peuvent prendre « différentes formes, notamment numérique (par exemple : des fichiers de données stockés sur un support électronique ou optique), matérielle (par exemple : sur papier) ou en tant qu'information intangible (par exemple : les connaissances des salariés) » et être transmises « par différents moyens, notamment par courrier ou dans le cadre de communications électroniques ou verbales » (ISO, 2018, p. 13). Au cœur de la gouvernance de l’information se trouve le caractère essentiel du contrôle et de l’accessibilité de l’information, de sa gestion rentable, et de la valeur de l’information en lien avec les exigences de conformité et de reddition de compte (Davis, 2010; Kooper et al., 2011). La gouvernance de l’information considère également les problématiques liées à la protection des ressources et des systèmes d’information. L’ensemble de ces préoccupations ainsi que des considérants internes et externes à l’organisation vont nécessairement influer sur le type de gouvernance de l’information retenue (White et al., 2007), laquelle doit s’aligner avec la stratégie organisationnelle (Maurel, 2013; Smallwood, 2014; ARMA International, 2018).
Dans toute écologie ou tout écosystème organisationnel, la stratégie et les dynamiques du pouvoir constituent des incontournables (Davenport, 1997; Letiche et van Mens, 2003; Moore, 2006; Koenig, 2012). L’aspect relationnel de la gouvernance de l’information est primordial. Un cadre de gouvernance, tant sa structure que ses processus, devrait être conçu en tenant compte de l’ensemble des acteurs concernés (Kooiman, 2002), et s’inscrire dans une culture informationnelle partagée (Choo, 2013; Oliver et Foscarini, 2014). Cela implique de tenir compte de l’action collective d’acteurs aux intérêts parfois distincts, qui ont tendance à approcher l’information, les risques informationnels et les technologies en fonction de leurs responsabilités dans l’organisation et des champs disciplinaires dont ils sont issus. De l’action collective de ces acteurs et du consensus qui s’établit doit émerger une gouvernance négociée, celle-ci participant à l’établissement d’un nouvel ordre organisationnel, en l’occurrence ici autour de préoccupations informationnelles (Strauss, 1978, 1992; Friedberg, 1997). Une telle gouvernance de l’information se veut donc globale et transversale, intégrant toutes les fonctions de l’information au-delà des unités administratives et des champs disciplinaires, afin d’éviter des initiatives « en silo ». Elle se veut également interactive et participative puisqu’entrent en considération des notions de participation, de pouvoir et de négociation.
Le pouvoir (ou influence) et les habiletés politiques font partie de la vie en organisation (Mintzberg, 1983; Pavy, 2002) et devraient donc être pris en compte pour prétendre à une gouvernance efficace. Si des jeux d’acteurs pour le pouvoir s’observent dans toutes les organisations, les acteurs n’ont pas tous le même poids politique ni les mêmes capacités à jouer le jeu politique pour s’affirmer comme des joueurs importants, sinon incontournables, de la gouvernance de l’information. Le pouvoir consiste en l’habileté d’une personne ou d’une unité administrative à influencer d’autres personnes ou unités, groupes, etc., de manière à ce qu’ils livrent les résultats escomptés (Bergeron, 2006; Daft, 2016; Moran et Morner, 2017). Il peut être exercé de manière verticale, donc hiérarchique, et s’apparenter ainsi à l’autorité, ou encore de manière horizontale entre les unités administratives.
Les sources de pouvoir sont multiples et doivent être modulées selon le statut occupé par les individus ou les unités administratives dans l’organisation. Au-delà de sources structurelles du pouvoir (légitimité du statut hiérarchique et donc pouvoir d’autorité, assorti du pouvoir de récompense, de coercition et d’information; ressources à allouer, créant une possible situation de dépendance; etc.), des sources personnelles (ou conjoncturelles) sont également à considérer (expertise; compétences; affiliation; etc.) (Ouimet, 2008; Lainey, 2015; Daft, 2016). Quelles sont alors les sources de pouvoir et d’influence réelles des professionnels de l’information-documentation-communication par rapport à leurs « partenaires d’affaires » dans leur organisation ?
Des habiletés « politiques » fondamentales doivent aussi être maîtrisées, par exemple « faire une lecture perspicace de la conjoncture dans laquelle [les acteurs] se trouve[nt] » (Ouimet, 2008, p. 78). Cette lecture se traduit par un questionnement stratégique pour bien comprendre le contexte et savoir exploiter les bases du pouvoir politique en organisation : comment, au sein de cet écosystème que forme l’organisation, se manifestent les jeux de pouvoirs ? Peut-on identifier des acteurs-métiers systématiquement aux manœuvres ou au cœur de problématiques relationnelles de gouvernance ? Quels sont les leviers pour résoudre ces problématiques ? Quels sont l’identité et le rôle des acteurs ? Comment exercent-ils ces habiletés ? Sur quels construits ? En s’appuyant sur quelles ressources ? Peut-on identifier leurs intérêts, leurs enjeux ? Ceux-ci sont-ils individuels ou collectifs ? Ces « luttes de pouvoir » prennent-elles forme dans certains secteurs d’activité, certains milieux et cultures professionnels ? Peut-on dresser une typologie ou tout au moins en extraire des caractéristiques saillantes ? (IIED, 2005; Ouimet, 2008; Lainey, 2015). Les habiletés « politiques », au sein des organisations, sont-elles réservées aux hauts dirigeants ou doivent-elles être mobilisées par les professionnels de l’information, de la documentation et des communications ?
Au sein de ce numéro, nous nous interrogerons également sur les professionnels de l’information-documentation-communication. Ces derniers sont-ils prêts (et/ou préparés) à mettre en œuvre de telles habiletés pour s’affirmer comme joueurs incontournables au sein de la stratégie de gouvernance de l’information de leur organisation ? Peuvent-ils s’appuyer sur des dispositifs et outils pour les soutenir dans cette démarche ? Sentent-ils qu’ils ont les compétences pour ce faire et désirent-ils s’en prévaloir ? Dans un contexte où s’amorce une réflexion sur l’implantation d’un cadre de gouvernance de l’information, où s’affrontent les intérêts des acteurs organisationnels et où doivent se redéfinir les rôles des acteurs dans cette gouvernance négociée, quid du rôle des professionnels de l’information-documentation-communication ? Sont-ils considérés comme des acteurs importants et/ou influents ? Désirent-ils l’être et comment peuvent-ils s’affirmer stratégiquement ? Les jeux de pouvoir, dans les organisations, doivent-ils s’exercer tant aux plans opérationnel et tactique que stratégique ? Quelles doivent être les relations d’acteurs dans l’exercice de ce pouvoir organisationnel ? Quelle image de marque les professionnels de l’information-documentation-communication doivent-ils développer au sein de leur organisation ? Quelles stratégies de défense de leur champ d’expertise (advocacy) doivent-ils conduire pour ce faire ?
Voilà autant de questionnements s’inscrivant dans la thématique de ce numéro axé sur le pouvoir et la stratégie chez les acteurs de la gouvernance de l’information.
AIIM (Association for Information and Image Management). (2014). It’s not information governance, it’s information opportunity. Silver Spring : AIIM.
ARMA International. (2018). Information governance body of knowledge (iGBOK). Overland Park : ARMA International.
Bergeron, Pierre G. (2006). La gestion dynamique : concepts, méthodes et applications. 4e éd. Montréal : Gaëtan Morin Éditeur.
Bergeron, Pierrette, Christine Dufour, Dominique Maurel et Diane Mercier. (2009). La gestion stratégique de l’information. In Jean-Michel Salaün et Clément Arsenault (dir.). Introduction aux sciences de l'information. Montréal : Presses de l'Université de Montréal, p. 183-205.
Choo, Chun Wei. (2013). Information culture and organizational effectiveness. International Journal of Information Management, vol. 33, no 5, p. 775-779.
Daft, Richard L. (2016). Organization theory and design. 12e éd. Boston : Cengage Learning.
Davenport, Thomas H. (1997). Information ecology : mastering the information and knowledge environment. New York : Oxford University Press.
Davis, Judith R. (2010). Information governance as a holistic approach to managing and leveraging information, BeyeNetwork Custom Research Report prepared for IBM Corporation. [s.l.] : BeyeNetwork – A Tech Target Company.
EDRM (The Electronic Discovery Reference Model). (2011). How the Information governance reference model (IGRM) complements ARMA International’s Generally accepted recordkeeeping principles (GARP). [s.l.] : EDRM.
Friedberg, Erhard. (1997). Le pouvoir et la règle : dynamiques de l’action organisée. Paris : Éditions du Seuil.
IIED (International Institute for Environment and Development). (2005). Analyse du pouvoir des parties prenantes. [s.l.] : IIED.
ISO (International Organization for Standardization). (2018). ISO/IEC27000:2018 – Technologies de l’information – Techniques de sécurité – Systèmes de management de la sécurité de l’information – Vue d’ensemble et vocabulaire. 5e éd. Genève : ISO.
Koenig, Gérard. (2012). Le concept d’écosystème d’affaires revisité. M@n@gement, vol. 15, no 2, p. 209-224.
Kooiman, Jan. (2002). Governance : a social-political perspective. In Jürgen R. Grote et Bernard Gbikpi (dir.). Participatory governance : political and societal implications. Opladen : Leske + Budrich Verlag, p. 71-96.
Kooper, Michiel, Rik Maes et E.E.O. Roos Lindgreen. (2011). On the governance of information : introducing a new concept of governance to support the management of information. International Journal of Information Management, vol. 31, no 3, p. 195-200.
Lainey, Pierre. (2015). Pouvoir, influence et habiletés politiques dans les organisations. 2e éd. Montréal : Éditions JFD.
Lemieux, Victoria (dir.). (2013). Financial analysis and risk management. Berlin : Springer.
Letiche, Hugo et Lucie van Mens. (2003). Dyslogistic information ecologies. Management Learning, vol. 34, no 3, p. 329-347.
Logan, Debra. (2010). What is information governance ? And why is it so hard ? Gartner Blog Network. <https://blogs.gartner.com/debra_logan/2010/01/11/what-is-information-governance-and-why-is-it-so-hard/>
Maurel, Dominique. (2013). Gouvernance informationnelle et perspective stratégique. In Viviane Clavier et Céline Paganelli (dir.). L’information professionnelle. Paris : Hermes Science Lavoisier, p. 175-197.
MacLennan, Alan. (2014). Information governance and assurance : reducing risks, promoting policy. London : Facet Publishing.
McManus, John. (2004). Working towards an information governance strategy. Management Services Journal, vol. 48, no 8, p. 8-13.
Mintzberg, Henry. (1983). Power in and around organizations. Englewood Cliffs : Prentice-Hall.
Moore, James F. (2006). Business ecosystems and the view from the firm. The Antitrust Bulletin, vol. 51, no 1, p. 31-75.
Moran, Barbara B. et Claudia J. Morner. (2017). Library and information center management. 9e éd. Santa Barbara : Libraries Unlimited.
Oliver, Gillian et Fiorella Foscarini. (2014). Records management and information culture : tackling the people problem. London : Facet publishing.
Ouimet, Gérard. (2008). Psychologie du pouvoir organisationnel : la maîtrise des habiletés politiques. Montréal : Chenelière Éducation.
Pavy, Gérard. (2002). La logique de l’informel : à la découverte des jeux de pouvoir dans l’entreprise. Paris : Éditions d’Organisation.
Schlögl, Christian. (2005). Information and knowledge management : dimensions and approaches. Information Research, vol. 10, no 4, paper 235, <http://InformationR.net/ir/10-4/paper235.html>.
Strauss, Anselm L. (1978). Negotiations : varieties, contexts, processes, and social order. San Francisco : Jossey-Bass.
Strauss, Anselm L. (1992). La trame de la négociation : sociologie qualitative et interactionnisme. Textes réunis et présentés par Isabelle Baszanger. Paris : L’Harmattan.
Smallwood, Robert F. (2014). Information governance : concepts, strategies, and best practices. Hoboken : Wiley.
Smallwood, Robert F. (2016). Information governance for executives : fundamentals and strategies. San Diego : Bacchus Business Books.
White, Don, John McManus et Andrew Atherton. (2007). Governance and information governance : some ethical considerations within an expanding information society. The International Journal for Quality and Standards, vol. 1, no 1, p. 180-192.
* La revue fait partie de la liste des revues classées du domaine des Sciences de l’information et de la communication (SIC) ainsi que par la FNEGE au rang 4.
Co-dirigé par :
Christophe ALCANTARA, Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication, IDETCOM, Université Toulouse 1 Capitole
Francine CHAREST, Professeure titulaire au Département d’information et de communication de l’Université Laval
Alain LAVIGNE, Professeur titulaire au Département d’information et de communication de l’Université Laval
La numérisation de la société est un mouvement de fond qui plonge les organisations et leurs pratiques professionnelles dans l’ère de l’Intelligence artificielle (IA). Ce concept est apparu en 1956, et la littérature attribue généralement la paternité de l’expression à John McCarthy. De façon schématique, l’IA repose sur deux approches distinctes et complémentaires, le cognitivisme et le connexionisme (Benbouzid, Cardon, 2018 ; Jordan, 2018). Le premier fondement, symbolique, repose sur des travaux menés dans le domaine des sciences de l’apprentissage profond (Deep learning). Il tente tant bien que mal de recréer un cerveau «artificiel» à partir de modèles mathématiques et informatiques (Julia, 2019). L’autre, connexionniste, repose sur des approches probabilistes développées dans le domaine de l’apprentissage des machines (Machine learning). Il étudie les connaissances acquises ou développées par différents types d’apprentissage (supervisé, non-supervisé, par transfert, par renforcement, etc.). Ce dernier fondement est appliqué dans la vie « réelle » ; réelle en ce sens que l’univers connexionniste n’est pas conçu par des programmateurs mais qu’[…« il est désormais composé de connaissances qu’il faut aller chercher auprès de spécialistes de différents domaines […], formuler dans un langage le plus naturel possible afin que des utilisateurs puissent interagir avec elles en leur posant des questions» (Cardon, Cointet, Mazières, 2018). Il est alors intéressant de nuancer cette présentation entre les pôles cognitivistes et connexionistes en faisant référence aux travaux de Varela ( Varela, 1988). En effet, si le critère d’évaluation de la cognition reste toujours « la représentation adéquate d’un monde extérieur prédéterminé », Varela développe le concept d’énaction, un paradigme qui insiste sur la dimension incarnée de la cognition qui prend en considération les interactions du sujet avec son écosystème. L’énaction considère alors la cognition humaine comme référant non pas « à la résolution de problèmes au moyen de représentations, mais plutôt [au] faire-émerger, créateur d’un monde ».
Co-dirigé par :
Valérie Bonnet, Maîtresse de conférences (HDR) en Sciences de l’Information et de la Communication, Lerass, Université Paul Sabatier (Toulouse 3)
Pierre Camille-Delahaye, Docteur en Sciences de l’Information et de la Communication, Lerass-Ceric, Université Paul Valéry (Montpellier 3)
Brigitte Sebbah, Maîtresse de conférences en Sciences de l’Information et de la Communication, Lerass, Université Paul Sabatier (Toulouse 3)
Entendu communément comme l’art de raconter des histoires, comme type spécifique de récit évocateur ou de mise en scène d’un message, ou technique narrative, le storytelling se caractérise également par un flou, signe d’une instabilité tant dans sa forme que dans les contenus qu’il véhicule. Christian Salmon, qui a introduit la notion dans le grand public prédisait dans son dernier ouvrage, L’Ère du clash (2019), la fin du storytelling. Et pourtant, les analyses des campagnes de diverses institutions ou des discours politiques font montre d’une large utilisation de cette communication narrative. Cette mise en avant du récit dans ses usages managériaux, et communicationnels, ne doit néanmoins pas cacher une réflexion davantage ancienne et fondamentale sur la notion, ainsi que le souligne Marc Lits (2012) lors d’un bilan des travaux de l’ORM de Louvain. Citant les travaux de Michel de Certeau (1980), de Gianni Vattimo (1990), les analyses de Louis Quéré (1982) sur l’information postmoderne, les observations du publicitaire Jacques Pilhan (1995) à propos des hommes politiques, les analyses de Jean-François Lyotard (1989) sur l’instrumentalisation de la fonction narrative ou encore les réflexions de Yves Citton (2010), l’auteur montre en quoi le récit touche aux multiples dimensions traversant l’espace public et le vivre ensemble.
Co-dirigé par :
Frédéric AUBRUN, École Européenne INSEEC U., MARGE
Karine BERTHELOT-GUIET, CELSA - Sorbonne Université, GRIPIC
Caroline MARTI, CELSA - Sorbonne Université, GRIPIC
Valérie PATRIN-LECLERE, CELSA - Sorbonne Université, GRIPIC
Ce numéro de Communication & Management vise à questionner les liens entre médias et publicité et notamment à interroger ce que certains chercheurs définissent comme la publicitarisation. Il s’agit de mettre au jour et d’analyser les métamorphoses de la communication marchande et ses conséquences au niveau économique, éthique et symbolique, dans les champs organisationnel, culturel, médiatique et plus spécifiquement journalistique. Pour Patrin-Leclère, parler de publicitarisation, « c’est choisir de scruter ce que la publicité fait aux médias, dans leur forme et dans leur contenu ; c’est penser ensemble la création médiatique et le financement de l’entreprise ; c’est tisser délibérément ce qui est souvent analysé distinctement, à savoir les faits de culture et les questions économiques » (2014, p. 41). La publicitarisation est un moyen alternatif pour les marques de se promouvoir dans les médias. « Un annonceur qui achète moins d’espace publicitaire ne considère pas pour autant qu’il n’a pas besoin des médias pour rendre visibles sa marque, ses produits, ses services : il se préoccupe donc de le faire autrement. Il peut par exemple chercher à entrer plus avant dans le média, à s’immiscer dans le contenu éditorial, par exemple dans le cadre d’un traitement journalistique ou d’un placement de produit » (2014, p. 42), explique-t-elle. Cette publicitarisation des médias englobe toutes les hybridations qui croisent production éditoriale et production publicitaire et peut prendre diverses formes : publi-rédactionnel, publi-information, publi-reportage, articles sponsorisés, etc. Cette adaptation de la publicité au média est désignée par Patrin-Leclère comme une « tentative de gommage de la rupture sémiotique » (p. 50, 2014) : publicité et média ne doivent former qu’une seule et même entité.
Consultez les résumés des articles
des différents numéros et les acquérir
sur le site CAIRN.
Editions Eska
12, Rue du Quatre Septembre
75002 Paris
Tél.: +33(0) 1 42 86 55 55
Site : www.eska-publishing.com